La Liberté Manifeste - Chapitre 4 #2
Comment être altruiste dans une société où personne n’a la Liberté de choisir d'aider ?
(Suite de l’épisode précédent, ici.)
La Société Libre - Suite
Élie : “Droit à la santé”, “droit à la dignité”, “droit au logement”... Y a-t-il une telle place pour de tels droits dans une société libre ?
Stéphane : Merci pour cette question, elle revient en effet souvent comme inquiétude tant le modèle de Libéralie semble à beaucoup éloigné de la façon dont ces sujets sont vécus actuellement. Une réponse en trois temps me vient à l’esprit.
Tout d’abord, il convient de se demander si ces droits sont bien des droits, légitimes. Sauf erreur, ils sont inscrits au sein de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, de l’ONU, ils viennent donc du droit positif, du droit positif relativement récent. Sont-ils ainsi légitimes ? Quiconque a lu le chapitre 2 sur le Droit naturel saura la réponse, qui est “non”. Paradoxe - apparent - de tels “droits”, ils semblent vraiment fondamentaux, donc importants en tant que droits. Mais s’ils sont vraiment indispensables, si se soucier de la santé est de première importance, comment l’Humanité a-t-elle pu survivre sans que la santé soit inscrite à la DUDH par l’ONU en 1948 ? Clairement, le Droit naturel a suffi pendant ces millénaires.
De plus, comme tous les “droits à” quelque chose, par opposition au “droit de” faire du Droit naturel, ces faux droits ne peuvent être mis en œuvre qu’à l’aide de plans de redistribution ou de discrimination “positive” - ma dignité est au prix de la tienne, ma santé est au prix de tes finances - redistribution qui ne saurait être légitime, puisque porteuse d’une agression.
Bien sûr, au-delà de cette question formelle, ces sujets sont de vrais sujets. Comment Libéralie les aborde-t-elle ? Prenons la santé et le logement, car ils sont de même nature. Si la santé est un sentiment - certains diront que c’est un état objectif de notre corps - elle n’a d’expression sociale concrète qu’à travers les moyens - produits, services - à disposition de tout un chacun pour que sa santé se conserve ou s’améliore. Tout comme le logement, qui est aussi affaire de produits ou de services, de solutions économiques pour l’individu. Ces deux domaines, ces deux “droits” sont donc d’ordre purement économique : si l’abondance pourvoit chacun en solutions de santé et de logement, ces droits seront respectés, comblés.
La réponse de Libéralie est alors évidente. Libéralie laisse le libre marché nous apporter la pleine prospérité et la richesse par la multiplicité toujours renouvelée des solutions à nos besoins, à tous types de besoins, logement et santé compris. Quelle redistribution pourrait donc mieux assurer chacun de la satisfaction de ces droits qu’une société de marché libre ?
Reste la dignité. Le Larousse définit ce terme vague par un autre terme vague : “Respect que mérite quelqu’un ou quelque chose.” Il s’agirait donc d’un simple droit au respect, un droit de bon sens en Libéralie. Pour réponse, je me bornerai ainsi à rappeler le Principe de tolérance évoqué au chapitre 2 : “Chacun se doit de respecter a priori les choix pacifiques d’autrui, de défendre ses préférences par l’argumentation, et non par la menace ou l’intimidation. Inversement, chacun est légitime à choisir d’interagir ou pas avec quiconque.”
Élie : “Le libéralisme, dit-on, c’est le renard libre dans le poulailler libre”. La société libre que vous défendez n’est-elle pas au fond qu’une apologie d’une forme d’égoïsme décomplexé ? Ne condamne-t-elle pas les plus démunis et les plus fragiles à un triste sort ?
Stéphane : Commençons par une boutade pour répondre à la boutade usée jusqu’à la corde du renard et du poulailler. Si l’on parle de poulailler, alors il faut aussi parler du fermier qui tient les poules enfermées : c’est bien sûr l’état qui tient ses citoyens en esclavage. Le renard, si l’analogie avec le “riche” devait avoir le moindre sens, n’est jamais aussi dangereux que lui.
Mais revenons à la question de l’égoïsme. Ce mot est d’évidence mal compris. Il est opposé à l'altruisme, mythe d’un idéal de partage. Cela suffirait à disqualifier quiconque donne de vagues signes d’égoïsme. Or, qui sur Terre n’agit pas sur l’impulsion de son propre intérêt, de ses motivations intimes pour satisfaire une envie, un besoin ou une pulsion personnelle ? Personne. Comment dès lors peut-il être ‘mal’ d’agir selon le mécanisme humain universel ?
Attention, bien entendu, cela ne veut absolument pas dire que cet égoïsme naturel conduit à la barbarie, ce qui bien sûr est la thèse de courte vue des gauchistes. Car on agit en société. Or en société, en Libéralie libre, les actions de chacun, même si ‘égoïstes’, prennent la forme de multiples interactions et échanges, libres et spontanés, avec ses congénères. Mon égoïsme et celui de mon voisin nous conduira à un moment à échanger quelque service. Ce libre choix mutuel d’un échange profite forcément aux deux, puisqu’il est librement décidé. Voilà mon action égoïste qui rend service à mon voisin et inversement. Voilà l’altruisme libre.
La question de l’égoïsme ainsi désamorcée, reste celle des “plus fragiles”. Ainsi, ceux qui posent cette question imaginent que les “plus fragiles” - sans qu’on ne sache vraiment qui ils sont ni pourquoi ils seraient irrémédiablement “fragiles” - une fois dans une société libre, ne pourraient qu’y trouver “un triste sort”. Mais si les “faibles” libres sont incapables de vivre libres, sans qu’on sache pourquoi, pourquoi cela interdirait-il aux autres, libres aussi, de leur venir en aide ? Pourquoi ces critiques semblent-ils associer la Liberté à un égoïsme plus inhumain et sauvage que celui dont les mêmes gens seraient munis en société étatisée ? Les gens seraient donc plus ou moins égoïstes selon la Liberté qui les entoure ? Mais comment peut-on être altruiste dans une société communiste, là où personne n’a plus la Liberté de choisir de l’être ? La générosité vraie suppose le choix de l’être, donc la Liberté.
Continuez votre lecture avec un essai gratuit de 7 jours
Abonnez-vous à Lettres de Libéralie pour continuer à lire ce post et obtenir 7 jours d'accès gratuit aux archives complètes des posts.