Mo Yan
Je lis un livre de l’auteur chinois Mo Yan (Nobel de Littérature), «Beaux seins, belles fesses». Ce n’est pas un texte érotique, bien qu’il y flotte un érotisme certain de par l’écriture elle-même. Non, il s’agit plutôt de la longue et riche histoire d’une famille chinoise modeste à l’époque où ce grand pays verra la montée au pouvoir du régime communiste. Masquée dans le tissu d’un récit d’apparence anodine et sous l’arc-en-ciel des détails de la vie quotidienne, la critique des effets des régimes despotiques n’en est pas moins bien présente.
Dans ce pays au climat continental, les hivers peuvent être fort rigoureux. La famille, nombreuse et endeuillée par l’invasion japonaise, connaît la famine. Une famine sévère. Comme beaucoup d’autres familles, après bien des extrémités, ils s’en vont à la ville, dans l’espoir d’y trouver plus de chances, de l’aide, quelque chose. Ils y trouvent d’abord la foule des autres affamés. Et dans cette foule, il y a de nombreux autres enfants. Beaucoup avec un brin de paille glissé dans le col. Discret, mais bien visible.
Brin de paille
Une note m’apprend qu’alors, le brin de paille était un signe bien connu, trop sans doute. Il indiquait au passant que cet enfant était à vendre. La honte se faisait discrète, mais la famine était ainsi bien visible. Il fallait vendre ses enfants pour vivre, et espérer qu’ils vivent. Cela arrivait assez souvent pour qu’un code y ait pris place. C’est à ce genre de pratiques – et à leur absence – qu’on mesure la valeur d’un régime.
Pourquoi évoquer une telle anecdote littéraire dans nos pages ? Parce qu’elle renvoie à une question importante de droit naturel. Est-il légitime pour des parents de vendre leurs enfants ? Sous quelles conditions ? Les parents sont-ils propriétaires de leurs enfants ? Ou de simples « gardiens », ou tutelles ?
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