Invitation
Comme d’autres je suppose, je reçois il y a de cela quelques semaines, un email de Wikiberal, m’invitant à y contribuer, ce dont je les remercie vivement.
Je vous livre ici ma réponse à Alexis.
Bonjour Alexis,
Merci pour cette invitation, et surtout pour la volonté qu’elle manifeste de voir la meilleure connaissance des concepts de la Liberté mieux se développer.
Je suis néanmoins très partagé quant à cet appel à contributions, soudain et qui me semble peu structuré.
Militant très actif de la Liberté, je connais bien sûr Wikiberal depuis fort longtemps, et pourtant, comme la plupart des gens que je côtoie, je n’y fais pratiquement jamais référence.
Non pas que l’idée d’une «encyclopédie» soit mauvaise, au contraire. L’existence de divers concurrents, tel Liberpedia par exemple, en illustre le besoin. Mais comme toute concurrence, ce site et d’autres montrent que le besoin n’est pas satisfait, à mon sens est même loin d’être satisfait, par Wikiberal.
De nombreuses raisons peuvent expliquer cette défaillance à la reconnaissance, après tant d’années investies, pourtant. Pour ma part, j’en identifie deux essentielles – bien sûr, je peux me tromper. Elles expriment il me semble une même erreur stratégique que celle commise par Wikipedia : la connaissance n’est pas un produit démocratique. Autrement dit, on ne peut obtenir de la qualité sans niveler par le haut, pour reprendre la devise de Contrepoints, hélas combien mise à mal ces dernières années.
Niveler par le bas
Ainsi, on trouve sur Wikiberal des articles très inégaux en qualité et surtout en pertinence. Les articles pertinents et de qualité sont souvent écrits par des auteurs comme Thierry Falissard, dont la compétence en matière de libéralisme ne fait aucun doute. Ces rares auteurs sont aussi cohérents avec la pensée libérale contemporaine, celle menée par les libertariens et anarcaps. Beaucoup d’autres articles par contre sont peu cohérents, dépassés, voire carrément faux, par exemple quant il s’agit de théorie économique, où trop souvent le site oublie que c’est l’école autrichienne qui montre la voie.
Deux raisons à cela donc, à mon avis. La principale, c’est le relativisme doctrinal. L’histoire des idées libérales étant diverse, multiple, il en serait de même quant à la doctrine elle-même.
C’est malheureusement faux et c’est une erreur fondamentale. La même chose existe en physique, où il ne viendrait à personne l’idée de laisser à penser que la physique quantique ferait question en soi.
L’histoire des idées libérales est bien sûr complexe et a suivi bien des chemins tourmentés. Il convient certes d’en faire le récit objectif. Mais cette histoire a fait émerger quelques résultats qui sont désormais peu contestables, à savoir l’école autrichienne et le jusnaturalisme qui lui est associé. Il est dès lors, je crois, essentiel de commenter notre héritage intellectuel à cette lumière.
Ce n’est ainsi que retarder la diffusion des idées de Liberté que de faire encore la promotion, et non la critique, des utilitaristes, par exemple. De la même manière, traiter du monopole ne peut pas se faire valablement à partir d’une vision où le monopole pourrait être un effet du libre marché, alors qu’il ne peut venir que de la législation et son arbitraire.
Relativisme
Ce relativisme transpire un peu partout dans le Wikiberal actuel, probablement parce qu’il reflète ses contributeurs, voire sa Direction. Je ne serais par surpris si tu m’opposais que la certitude doctrinale que j’évoque n’est que la mienne et qu’en réalité, rien n’est si sûr et que c’est de la concurrence que la «vérité» peut sortir, qu’il faut donc préserver. Il y aurait une concurrence à 2+2=4 ?
Je pourrais répondre par un contre-argument théorique, mais je préfère retourner l’argument : si la concurrence doit être la règle, comment se fait-il que pour chaque article, il n’y ait pas une version austro-anarcap sur le site ? Ou, variante de cette idée, qu’appel soit fait systématiquement à un/des anarcaps pour rédiger une «nuance» à chaque article ? Pourtant, on verrait ainsi très vite où la cohérence et la qualité se placent.
Seconde raison, tu l’auras compris, c’est le mode d’organisation de Wikiberal. À l’heure actuelle, on ne sait qui rédige, qui décide des sujets, qui attribue et valide les textes, quelle ligne éditoriale est suivie, comment et qui assure la revue et l’amélioration des anciens articles, etc. etc. Tout est opaque, anonyme, laissé à un noyau d’inconnus sans responsabilité réelle envers nos idées. Ce ne serait pas un problème si la qualité était au rendez-vous. Mais là, c’est la faiblesse générale des textes qui fait poser la question du qui et du comment.
Niveler par le haut
Pour ma part, je promeus depuis des années l’idée que la formation au libéralisme doit être organisée de façon à aider les lecteurs à monter dans ce que j’appelle la Pyramide Libérale. J’ai par exemple écrit un article qui suggère à Contrepoints une méthode de conception de son catalogue d’articles, qui je crois reste applicable à Wikiberal - ici :
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