Le "Conservative Manifesto" de Jordan Peterson
Où l'on voit poindre la souveraineté individuelle comme valeur centrale de sa pensée...
Jordan Peterson
Jordan Peterson est un nom bien établi depuis quelques années dans les domaines à la croisée de la psychiatrie et du développement personnel, de la culture occidentale et de la lutte contre le marxisme et le postmodernisme. Plus récemment, le voilà qui prend des positions plus politiques, avec un positionnement gravitant entre le conservatisme et un libéralisme que l’anglais américain qualifie de « classique », proche d’un minarchisme.
Sur cette ligne, il vient de publier il y a quelques semaines un “Conservative Manifesto”, un Manifeste Conservateur, dont la réputation de son auteur m’a semblée suffisante pour en justifier ici la lecture et l’analyse.
Le texte est relativement court, du moins sa partie principale ; il est structuré de manière tout à fait claire. Pourtant à le lire, la première chose qui m’a interpelé vient de sa forme même : ce n’est pas vraiment un manifeste. D’un texte annoncé comme «conservative», on attend qu’il dessine une ligne politique, un projet de société, les grandes lignes d’une stratégie d’action politique. Or je n’ai su trouver aucun de ces éléments dans ce manifeste – ce qui toutefois n’enlève rien à son intérêt.
Manifeste
Cela s’explique néanmoins, quand on se souvient qu’il est écrit par Peterson. Celui-ci se focalise avant toute autre chose sur une analyse et une vision de notre monde en termes de valeurs (morales et sociales, pas économiques). J’en veux pour preuve la série de critères qu’il prend pour axes : humilité, liberté, identité, etc.
Jordan Peterson se propose de parler de sa vision d’un avenir non pas en termes d’institutions, mais en termes de valeurs humaines qui viendront fonder, porter, unir la société à laquelle il croit. C’est tout à fait cohérent pour le personnage. Mais cela loupe la cible d’un manifeste, à mon sens, quand on le présente en faisant référence au libéralisme et à la science politique en général. Cela manque de vision sociale.
Seconde remarque générale, comme il organise son manifeste autour de valeurs, son introduction qui cache sa critique – d’ordinaire acerbe – du communisme laisse de côté les grandes erreurs de cette pensée, à commencer par son utilitarisme (économie) et sa tyrannie intrinsèque (droit et justice). Peterson laisse ainsi clairement entendre que selon lui, la réponse conservatrice au communisme ambiant n’est pas tant dans une contestation systémique de la société collectiviste que dans un jeu cohérent de valeurs morales que chacun de nouveau se doit d’adopter, de transmettre et de vivre lui-même. De nouveau, cela me semble insuffisant et décalé, mais c’est parfaitement cohérent vu de son angle à lui.
Je ne compte pas faire ci-dessous une revue point par point de ce “manifeste”, mais j’ai retenu quelques endroits, quelques touches qui m’ont assez interpelé pour y réagir.
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