L’Anarcapie, une histoire de QI ?
Pas besoin d'être surdoué pour vivre en Anarcapie.
Imagine Nation
Les opposants à l’idée de Libéralie ou d’Anarcapie, s’ils manquent d’imagination pour en concevoir les contours, ne manquent par contre pas d’imagination pour trouver des arguments qui n’en sont guère. Parmi les nouveautés, on a compté récemment la contrainte du QI, le Quotient Intellectuel. Les concepts de Liberté seraient si subtils qu’il faudrait être doté de 130 au moins pour les cerner et surtout pour espérer y vivre.
Si mon QI m’a permis de bien comprendre, ce qui n’est pas sûr, le QI serait deux fois un obstacle à Libéralie : une fois pour en comprendre les concepts, qui seraient trop ardus ; et deux fois pour y vivre, car vivre en Liberté exigerait selon eux d’être plus intelligent que la moyenne. En essence, la Liberté ne serait pas pour tout le monde, elle serait même élitiste, bien trop élitiste. Dès lors, pour être vraiment humanistes, soyons minarchistes, car c’est bien plus accessible ! Soyons médiocres pour la Liberté !
Ainsi, pour espérer une «nation» — si je reprends un terme que beaucoup de ces gens affectionnent — de gens libres, il faudrait soit les trier sur le volet selon leur QI, soit peut-être leur faire passer un entraînement intensif de QI, un peu sans doute à la manière du vieux film La Planète Interdite où seule une sur-intelligence pouvait vivre.
D’une certaine manière, les partisans de cette vision des choses font écho à feu Gustave Le Bon, ce brillant analyste de La Psychologie des Fools démocratiques, ici :
«Les foules ne sauraient accomplir d’actes exigeant une intelligence élevée. Les décisions d’intérêt général prises par une assemblée d’hommes distingués, mais de spécialités différentes, ne sont pas sensiblement supérieures aux décisions que prendrait une réunion d’imbéciles.» — Gustave Le Bon
Histoire
Pourtant, il a existé des Anarcapie. Plusieurs, même. L’Irlande médiévale, l’Islande médiévale, la République de Cospaia en Italie à une époque un peu plus récente, sont des sociétés quasi-idéales pour les libertariens, qui ont bien existé ; c’est documenté. Et je ne parle même pas des Amérindiens, des rebelles de la Zomia, et de tant d’autres.
Or il paraît improbable que toutes ces sociétés libres inscrites dans l’Histoire ne furent faites que de l’association de gens disposant tous d’un QI digne d’Einstein. Au contraire, on a l’intuition que si leurs aristocraties étaient probablement au-dessus de la moyenne, la grande majorité de ces gens ne se distinguaient pas par cette qualité.
Encore aujourd’hui, il suffit de marcher sur un trottoir encombré pour se retrouver dans une situation d’anarcapie, de même que dans un métro surchargé. Si, si, je vous assure : sur un trottoir, on est en permanence attentif à ne pas heurter ses voisins ; on applique donc à l’instinct le Principe de Non-Agression sans policiers pour l’imposer.
Enfin, je ne peux résister à en appeler à Molinari, qui, voyageant en Russie de fin du XIXe siècle, y découvre des peuples dont l’esprit est à la Liberté, là encore instinctive :
«La bureaucratie ne va pas aux Russes et ils n’ont jamais pu la faire aller. Vous verrez qu’un de ces jours ils se mettront à faire du self-government, non par choix et par raisonnement, mais tout simplement par instinct et par impossibilité de faire autre chose.» — Gustave de Molinari
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