Amour, Psychanalyse et Liberté - #2 Psychanalyse
Comment peut-on espérer aimer les autres, si l’on n’arrive pas à s’aimer soi-même ?
S’aimer, s’accepter
La psychanalyse, tout le monde le sait, a pris son essor au XIXe siècle, dans le sillage d’un certain Sigmund Freud. Tout le monde a entendu parler de la psychanalyse, certains en ont commencé une, bref, c’est devenu au fil du temps une technique relativement banale. Pour autant, bien peu de gens à mon avis arrivent à cerner le but de cette technique.
Pourtant, ce but est, du moins en théorie, facile à comprendre (y parvenir, c’est une autre paire de manches) : ce but est que le psychanalysé arrive à s’accepter tel qu’il est et non tel qu’il se fantasme par sa propre imagination, ce qui crée inévitablement des conflits lorsque l’individu se heurte à la réalité. En gros, il ne s’agit pas tant de « se débarrasser de ses casseroles » que de les accepter, d’accepter enfin de vivre avec, de les admettre comme faisant partie de soi, de ne plus tenter de les enfouir à tout prix.
Quelques proverbes illustrent cette démarche : « I forgive but I don’t forget » (je pardonne mais je n’oublie pas) ; « S’aimer, c’est parvenir à pardonner à l’enfant que nous avons été ».
Long apprentissage
La démarche analytique est donc un apprentissage parfois long et douloureux (mais salvateur) de l’amour de soi. S’aimer n’est pas du tout une démarche narcissique, bien au contraire. Le but n’est pas ici de flatter son ego, mais de tendre à ne pas se surestimer, ni se sous-estimer. Ça paraît simple, n’est-ce pas ? Mais si c’était si simple que ça en pratique, alors il y a fort à parier que les psychanalystes n’existeraient plus depuis belle lurette. Donc, facile à dire : oui ; facile à faire ? C’est loin d’être évident.
La raison en est facile à comprendre : pour se protéger, la plupart des gens dépensent une énergie parfois considérable à élaborer un personnage, une sorte de façade, un déguisement en somme, qu’ils n’enlèvent qu’une fois qu’ils sont seuls (et certains de ne pas être dérangés) sous leur douche ou dans leur lit de célibataire. Ce faisant, ils entrent plus ou moins consciemment dans une démarche de séduction, un jeu tentant en permanence de se montrer sous leur meilleur profil, allant même jusqu’à se créer des mythes lors de certains échanges (« Oui, heu, moi, je suis plutôt comme ci ou comme ça, etc. »). Ils vivent donc du moins socialement dans un paraître très souvent éloigné de leur réalité, une fois le soir venu.
Combien de fois n’avons-nous pas entendu la phrase : « Jamais je n’aurais pu imaginer que X ou Y pouvait être comme ça ! » si ou quand, par malheur, le pot-aux-roses est dévoilé un jour. Eh bien, le but de la psychanalyse est d’amener l’individu à ne plus rejeter par le déni qui il est, mais au contraire de ne chercher ni à masquer, ni à cacher tous les aspects de sa personnalité en tout premier à lui-même et, éventuellement, de ne pas avoir peur de se montrer tel qu’il est aux yeux des autres.
Être, plus que paraître
En clair, la psychanalyse tend à amener le psychanalysé à changer de logiciel, se débarrassant du jeu à « paraître » au profit de simplement « être ». C’est très compliqué pour ces gens habitués à leur « image » et sensibles avant tout au regard et au jugement des autres, toujours dans l’optique du personnage mythique qu’ils se sont construit au fil du temps.
Le point essentiel dans tout ça et que je retiens, c’est l’amour. Car comment peut-on espérer aimer les autres si l’on n’arrive pas à s’aimer soi-même ? Et ici encore, la définition tolstoïenne de l’amour prend toute son ampleur et sa justesse.
Voilà pour la psychanalyse. Rendez-vous bientôt pour le troisième chapitre : « La liberté ».
Alain Crémades